« Naruto, un projet sur lequel nous travaillons depuis 4 ans » : notre interview d’Hervé Lux, DG du Parc Spirou
En mai 2024, nous sommes partis à la découverte du Parc Spirou dans le Sud de la France. Située à quelques kilomètres d’Avignon, cette destination a souvent été décriée par la communauté des fans de parcs à thèmes : manque de cohérence, offre d’attractions faible…
Depuis la reprise en main du parc par le groupe d’édition Média-Participations en 2020, des investissements conséquents ont permis l’ouverture de nouvelles attractions. Dans les années à venir, plusieurs nouveautés doivent voir le jour pour booster le nombre de visiteurs de la destination. Nous avons rencontré Hervé Lux, Directeur Général du Parc Spirou Provence, début septembre 2024 pour parler du développement du parc de la bande dessinée.
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ParcsaThemes•fr : Hervé Lux, vous êtes le Directeur Général du Parc Spirou. Pouvez-vous nous présenter votre parcours professionnel dans le secteur des loisirs ?
Hervé Lux : J’ai commencé ma carrière à France Miniature au début des années 90. Je participais au suivi de la conception, puis de la construction, du parc. Je travaillais avec Thierry Coltier, un des créateurs de France Miniature.
Suite au rachat du parc par le Musée Grévin, je suis devenu responsable commercial des 2 entités. Après une parenthèse de quelques années, je reviens dans le monde des parcs comme Directeur communication et marketing de Marineland (2005) puis, en 2017, je suis nommé Directeur Général de La Mer de Sable.
En 2020, je deviens le DG du Parc Spirou. En passant de la Mer de Sable, plus ancien parc à thèmes de France, au Parc Spirou, le plus récent, la boucle est bouclée !
Lorsque vous prenez la tête du Parc Spirou, la destination a déjà 2 ans. Quel bilan dressez-vous de ces premières années d’existence ?
Le Parc Spirou est, à l’origine, un projet porté par des investisseurs passionnés qui ont été vite à court de moyens. Leur souhait était de construire un parc autour de licences, dans la région du Vaucluse. Ils ont rencontré le groupe Média-Participations qui a accepté de leur concéder l’utilisation de certains de leurs personnages et un droit d’exploitation de la marque Spirou.
En 2018, le parc est inauguré, avec seulement une dizaine d’attractions.
L’ouverture a été ce qu’elle a été. La communication également. Très rapidement, il a fallu se rendre à l’évidence que le parc n’avait pas été bien ouvert. Il a fallu continuer à développer la destination pour améliorer l’offre proposée aux visiteurs. Ceci a nécessité de mettre de l’argent sur la table. C’est à ce moment-là que le groupe Média-Participations, propriétaire des Éditions Dupuis, a souhaité s’impliquer dans la gestion du Parc Spirou et m’a demandé de les rejoindre.
Dans quelles conditions arrivez-vous à la tête du Parc Spirou ?
Quand j’ai rencontré le groupe Média-Participations, en 2020, je leur ai demandé quelle vision et quelle ambition ils avaient pour le Parc Spirou. J’ai constaté qu’il y avait une vraie envie de faire bouger la destination et qu’un plan, en plusieurs étapes, était prévu pour booster sa fréquentation.
Cette vision s’articule autour de 3 points :
- développer l’offre d’attractions,
- proposer une offre de qualité pour une visite d’une journée,
- faire en sorte que les habitants de la région s’approprient le parc, le repositionner comme un best of régional.
Il ne restait alors qu’à travailler sur un nouveau business plan et recapitaliser l’entreprise.
Les constats et la vision sont partagés par vous et le propriétaire du parc. Reste à traduire ça en actes ?
Pour nous, le développement du Parc Spirou doit reposer sur 3 piliers :
- rester attractifs en ajoutant régulièrement de nouvelles attractions.
- travailler sur la thématisation du parc
- améliorer le confort des visiteurs en créant des zones ombragées et des espaces végétalisés.
Notre plan de développement a été lancé en 2020. Ses premiers effets ont été visibles dès la saison 2021, avec une amélioration de la thématisation du parc grâce à la création de Marsu Jungle** et de Lucky Town.
En 2022, nous avons lancé la zone Kid Paddle / Game Over sur laquelle a été implantée un Disk’O Coaster du constructeur Zamperla, une aire de jeux aquatique, une zone pique-nique et un espace merchandising. Cette zone marque le franchissement d’un nouveau palier du point de vue du niveau de thématisation que nous souhaitons atteindre pour nos prochaines expériences.
En 2024, on a ouvert une très belle zone autour des personnages des Schtroumpfs. Elle abrite un cinéma dynamique***, dont le film a été produit par les studios du groupe Média-Participations « Ellipse Animation », ainsi qu’une boutique. On a également ouvert un manège de type tasses au sein de Lucky Town.
En parallèle, on a travaillé à l’amélioration du confort de visite en ouvrant de nouveaux points de restauration comme la Case à frites, Vroup Corner. On a aussi multiplié les terrasses ombragées, les brumisateurs, water playground, water ride et on a accéléré la couverture de nos files d’attente.
La destination doit composer avec l’existant. Des attractions comme En avant Seccotine, Fantasio Rodéo ou encore Boule et Bill déboulent dénotent vis-à-vis de vos ambitions. Est-ce que ces expériences ont un avenir au sein du Parc Spirou ?
Remplacer ces attractions n’est pas une priorité pour le moment. Nous devons garder ce type d’attractions car nous souhaitons rester un parc familial, où grands-parents et petits enfants peuvent partager des émotions ensemble. C’est aussi pour ça que nous avons investi dans un manège de type tasses cette année. Il peut accueillir des enfants dès 85 cm.
En revanche, nous travaillons à la réduction de la pression sur nos manèges moins capacitaires. Pour cela, nous ajoutons continuellement de nouvelles expériences comme le Disk’O et cette année le film dynamique « Les Schtroumpfs et le Grimoire Magique » et Rantanplan, une attraction de type tasses. Nous espérons aussi que la zone Naruto nous permettra d’absorber le nouveau flux de visiteurs.
En résumé, on ne ferme pas la porte au remplacement de En avant Seccotine, Fantasio Rodéo ou encore Boule et Bill pour des expériences plus capacitaires, mais ça devra faire l’objet d’un rebranding complet de cette zone centrale du parc. Pour le moment, je peux vous dire que ce n’est pas à l’ordre du jour.
Une extension du Parc Spirou est prévue pour 2026. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce projet ?
Actuellement, nous planchons sur le développement d’une extension du parc, car nous disposons encore de foncier libre. On compte ouvrir en 2026, sur une partie de ces terrains vacants, une nouvelle zone d’un hectare et demi****.
Cette zone mettra à l’honneur la licence Naruto. Les visiteurs découvriront le village mythique de Konoha. Ce land sera complet car on y retrouvera des attractions, de la thématisation, du merchandising, de la restauration, des services et un peu de spectacle.
Elle l’ouvrira en deux temps, avec une première phase en 2026 et une autre en 2028. Avec cet ajout, on souhaite marquer les esprits. Nous travaillons activement au développement de ce nouvel espace depuis déjà 2 ans et demi.
Avec l’arrivée de ce quartier Naruto au Parc Spirou, nous espérons que notre fréquentation annuelle continuera à augmenter. Nous espérons aussi séduire les lecteurs de ce manga, à savoir les ados et jeunes adultes.
Cette année est sorti « Le Voyage commence »*, l’hymne du Parc Spirou. D’autres initiatives sont-elles prévues pour donner une identité au parc ?
On avait besoin d’une ambiance sonore, qui immerge les visiteurs dès leur entrée dans le parc. Cette chanson représente bien ce que nous proposons au sein de la destination : des aventures au sein de licences de bande dessinée connues de tous.
Pour marquer davantage notre identité, nous allons mettre en avant nos mascottes. À l’ouverture du parc, on avait peu de mascottes et elles sortaient rarement. Actuellement, nous faisons en sorte de les sortir de plus en plus et on travaille à mieux informer les visiteurs sur les heures et les lieux de rencontre avec nos personnages (ndlr – le parc a lancé en 2024 son application).
En 2024, de nouvelles mascottes sont arrivées au parc : le Grand Schtroumpf et la Schtroumpfette. Ces animations ont pour but de renforcer notre identité auprès des visiteurs et d’affirmer le Parc Spirou comme le parc de la bande dessinée.
Cette année, vous avez racheté le parc voisin Wave Island. Vous devenez de facto un resort. Ce rachat était-il prévu ? Quid du développement de ce parc, complémentaire à l’offre du Parc Spirou ?
Même si ce n’était pas à l’origine dans nos plans, l’idée d’un rachat de Wave Island était une option qu’on avait en tête. Mais fallait-il encore que le parc aquatique soit mis à la vente !
Wave Island dispose encore de terrains libres qui pourraient nous permettre de le développer en ajoutant, par exemple, des bassins supplémentaires et des toboggans.
Même si chaque parc va avoir sa propre phase de développement, nous allons chercher à faire des opérations pour lier Wave Island au Parc Spirou.
Tout d’abord, nous avons la chance d’avoir un portefeuille de licences, ce qui est rare dans le monde des parcs aquatiques. Compte tenu du thème tropical de Wave Island, nous allons faire venir régulièrement le Marsupilami pour créer des animations. C’est un personnage à la fois aquatique et tropical. En revanche, nous n’avons pas pour ambition de complètement brander Wave Island autour d’une ou plusieurs licences.
L’autre point va être la création d’hébergements immersifs. Sur le terrain de Wave Island, il y a déjà des bungalows qu’on va thématiser pour leur donner une ambiance Surf Camp. Cette étape va nous permettre de mieux comprendre les attentes de nos visiteurs et ainsi déboucher sur une deuxième phase qui consistera à la création d’hébergements encore plus immersifs, avec une ambiance tropicale, pour accompagner l’augmentation de la fréquentation de la destination.
Merci Hervé Lux de nous avoir accordé ce long entretien.
C’était un plaisir. Ce que je dis toujours, c’est qu’il faut savoir pardonner, entre guillemets, à un jeune parc ses erreurs. Il faut lui laisser le temps d’avancer car, au final, le plus important c’est de regarder les efforts qu’il fait et sa capacité à se développer, s’améliorer. Les Parcs Regionaux ont tous eu entre 30 et 60 ans pour se développer, nous sommes un jeune Parc qui a 7 ans (dont 2 années covid) et qui parvient déjà à proposer une offre d’une journée, de qualité pour 320 000 visiteurs par an…
* La Mer de Sable ouvre ses portes en 1963
** La zone Marsu Jungle comprend les attractions Palombie Secrète, Splash Piranha, Houbi, Houba et un parcours pédestre
*** Ce film vient remplacer le film dynamique Supergroom et les Dinozorgs
**** Cette nouvelle zone représente 30% de la superficie du parc actuel
* La chanson « Le Voyage commence » a été écrite par Ludovic-Alexandre Vidal et composée par Julien Salvia, les auteurs de la comédie musicale du Parc Astérix « C’est du délire »